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RECHERCHE

Clotilde, 20 ans, ou la conquête d’une identité et d’une ouverture au monde

parce que nos jeunes le valent bien ...

Un immense champ des possibles s’ouvre
aux jeunes handicapés qui sont pris en compte et en considération

Clotilde a 20 ans. Elle est trisomique. Son parcours scolaire et d’apprentissage est la preuve même qu’un immense champ des possibles s’ouvre aux jeunes handicapés qui sont pris en compte et en considération.

... Mais pour sa maman, Catherine, il a souvent pris la forme du parcours d’une combattante.

Catherine était professeur de français et journaliste. Pour se consacrer à sa fille, elle s’est arrêtée de travailler pendant dix ans. Voici quels ont été sa méthode, son credo et son histoire.

  • Premier credo : Catherine a toujours exprimé à Clotilde qu’elle avait confiance en elle, qu’elle croyait en ses capacités à s’ouvrir au monde et à développer des compétences.
    ... Ce sont des recettes qui valent pour tous les enfants à l’école, dira-t-on...
    C’est vrai, mais plus vrai encore pour les enfants qui demandent une attention particulière à leur différence et à leurs besoins. La différence et les besoins de chacun d’entre eux.
  • Deuxième credo : les apprentissages réussissent surtout par le jeu, les échanges, le plaisir de « faire » ensemble. Et quand on s’occupe d’un jeune trisomique, cela veut dire encore plus d’attention et de patience.
    Car, il faut être capable d’attendre le moment du « déclic ». Une attente qui peut être très longue.
    Un exemple : comme la main de Clotilde était atonique, Catherine a d’abord posé sa paume sur la sienne pour faire avec elle des lignes d’écriture. Par le jeu et la communication, le désir d’aller plus loin ensemble, Clotilde a découvert le plaisir d’écrire.
  • Troisième credo : rechercher, trouver les bons supports d’apprentissage et d’ouverture au monde.
    Clotilde a ainsi pu baigner dans un environnement culturel très riche et développer une curiosité d’apprendre grâce à une méthode qui convient à sa différence et à ses besoins. Certains enseignements scolaires, comme les mathématiques et les sciences, trop abstraits pour elle, ont été laissés de côté. Mais elle a découvert et redécouvre sans cesse des émissions qui lui racontent le monde qui l’entoure. Par exemple les DVD de « C’est pas sorcier ».
    Au point, que quand le sujet des déchets est évoqué à l’école à l’occasion d’un commentaire de presse, elle prend l’initiative d’intervenir et de dessiner au tableau pour expliquer aux autres enfants le cycle de vie de la matière, depuis la production jusqu’au recyclage des déchets. Elle se passionne pour la médecine, la découverte et le rôle des antibiotiques, les cinq sens liés aux organes du corps humain.

    Clotilde a développé de cette façon peu à peu un véritable appétit de mieux se comprendre elle-même et de comprendre le monde qui l’entoure. Mais aussi de communiquer sa propre vision de la réalité, de la chanter (elle se passionne pour la chanson française et les auteurs « à texte » comme Georges Brassens et Maxime Le Forestier). Et même de l’écrire et de la mettre en scène pour communiquer avec d’autres.

    Clotilde, enfin, pratique l’Aïkido depuis l’âge de 3 ans. Elle est « ceinture marron » et elle va seule aux cours.

Cette belle histoire a aussi valeur d’expérience : si Catherine a beaucoup travaillé par elle-même pour apprendre et accompagner le mieux possible sa petite fille, les éducateurs, les AVS et les enseignants ne sauraient réussir sans une formation solide, continue, porteuse d’expériences et de progression professionnelles.
Et sans une présence durable auprès des jeunes qu’ils accompagnent.

« Parents, ne faites pas faire n’importe quoi à vos enfants... »

A l’école, tout n’a d’ailleurs pas toujours été facile. Clotilde a même été maltraitée en maternelle par une institutrice. Le dossier a été « enterré », malgré les traumatismes générés pour la petite fille et les risques pour d’autres enfants. Certains enseignants se sont montrés formidables. D’autres, plus fermés à la différence et enfermés dans leurs certitudes et la défense de leur contrat, ont fait bloc au sein de syndicats pour s’opposer aux demandes des familles.

Dans le département du Val-de-Marne, Les enfants trisomiques ne bénéficiaient pas encore à l’époque de l’accompagnement d’un AVS (Auxiliaire de Vie Scolaire) pour pouvoir être scolarisés en milieu ordinaire. N’étant pas dans la liste des "handicaps accompagnés, ils devaient s’orienter vers des CLIS (Classes pour l’Inclusion Scolaire, où se retrouvent les élèves en situation de difficulté et de handicap).
Catherine s’est jointe aux actions de l’association Grandir à l’Ecole pour que la loi soit appliquée et les droits des jeunes respectés.
Il a fallu se battre tous les jours, envoyer des dossiers, des lettres, des fax,...

Clotilde a pu être accompagnée par une AVS et scolarisée dans un collège privé sous contrat dans le Val-de-Marne. Les enseignants étaient à l’écoute, mais il n’existait pas alors de classe répondant aux besoins des jeunes handicapés. Et quand l’adolescente a approché de l’entrée en classe de 4e, l’AVS engagée par le chef d’établissement a été mise à contribution - à la stupéfaction de tous - pour « convaincre » la famille de l’enfant de trouver un autre lieu d’accueil. Catherine s’est battu à nouveau, a multiplié les interventions, les courriers.

Une inspectrice d’Académie, proche collaboratrice du recteur, a fait alors créer et mettre en place en deux mois de temps au lycée professionnel de Nogent une UPI (Unité Pédagogique d’Intégration). Avec de très bons résultats. L’apport d’un enseignant spécialisé y a été très déterminant pour les progrès de Clotilde.

Clotilde y est toujours scolarisée. On peut y préparer un CAP de couture, s’y former à la confection des costumes de théâtre, aux techniques de la tapisserie.  Elle rejoint une annexe de l’établissement qui débouche sur un baccalauréat d’accueil du public. Martine, son AVS continue de venir la voir. L’enseignant dédié à la classe spécialisée (les UPI ou Unités Pédagogiques d'Intégration sont devenues des ULIS ou Unités Localisées pour l'Inclusion Scolaire)  suit sa scolarité et ses progrès. Avec pour objectif, en particulier, l’obtention du CFG (Certificat de Formation Générale, successeur du Certificat de fin d’Etudes).

C’est un jeune trisomique de 20 ans, rencontré dans une réunion associative qui a convaincu Catherine de suivre les aspirations de sa fille, tant il l’a touchée par l’authenticité de son accent : «  Parents ne faites pas faire n’importe quoi à vos enfants. Je déteste ma formation, qui est de faire de la soudure... ».

Clotilde a fait plusieurs  stages : à la médiathèque de Saint-Maur, au théâtre, au conservatoire de musique. Elle fera en juin un nouveau stage aux Ateliers d’art de Saint-Maur auprès de la directrice. Elle se passionne pour la chanson, le cinéma et le théâtre (elle adore Feydeau, Beaumarchais, Molière). Elle écoute de la musique, joue du piano, fréquente la médiathèque. Elle écrit « à la manière de... » et compose des petits morceaux de pièces de théâtre. Elle aimerait se familiariser avec cet exercice.

Il faut une plus grande souplesse du dispositif d’accompagnement
et son élargissement à toutes les étapes importantes
de la formation des jeunes handicapés

«  Malgré tout ce que l’on pouvait me dire de négatif, j’ai choisi de me battre, d’aller à l’encontre des préjugés et des idées reçues. Nous, parents, n’avions pas le temps d’attendre que le monde change et que l’on croie enfin en la possibilité de nos enfants de développer des compétences, d’être désireux d’apprendre, ouverts aux autres, créatifs », commente Catherine. Mais peu de mères ont la formation de départ et ont la possibilité d’accompagner leur enfant pour un tel parcours.

Il faut donc absolument que la loi de 2005 soit réellement appliquée et que l’on puisse offrir à tous les jeunes handicapés un accompagnement par des professionnels formés, expérimentés, présents pendant plusieurs années. Un accompagnement qui soit adapté aux besoins et à la personnalité de ces jeunes, en prenant en considération leurs différences. Ce qui veut dire une plus grande souplesse du dispositif d’accompagnement et son élargissement à toutes les étapes importantes de leur formation. En particulier, pendant les stages de professionnalisation.

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