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Contribution de la FNASEPH - Août 2020 Périmètre de la future branche autonomie

A la demande du Gouvernement, une concertation est actuellement pilotée par Laurent Vachey, inspecteur général des finances autour de la création de la cinquième branche de la Sécurité Sociale, branche qui sera dédiée à l’autonomie. Mis au débat depuis plusieurs années, le principe d’un nouveau risque et d’une branche associée se concrétise dans un contexte sanitaire complexe.
La réforme de la politique publique relative à l’autonomie ne doit pas se limiter à la perte d’autonomie des personnes âgées. En effet nous affirmons que, pour tenir compte des attentes et des choix des personnes en situation de handicap et de leurs familles, il convient que soient enfin reconnus l’ensemble de leurs droits, tels qu’exprimés dans la convention internationale des Personnes Handicapées (CIDPH).

La concertation permettra de faire émerger des recommandations et propositions qui devront être reprises dans le rapport du gouvernement prévu pour la fin du mois de
septembre 2020.

Pour cadrer les réflexions et échanges, deux questionnaires – l’un traitant du périmètre de la 5ème branche, de son pilotage et de sa gouvernance, l’autre traitant de son financement – ont été proposés aux différentes parties prenantes.
Dans le cadre des échanges au sein de la commission éducation scolarité du CNCPH, deux points ont été plus particulièrement relevés, concernant le périmètre de la 5ème branche :

  • AEEH et AJPP : L'allocation d’éducation de l'enfant handicapé (AEEH), dont la CNSA finance une majoration, et l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) constituent une alternative à la PCH enfant (créée en 2008), mais avec une philosophie différente puisqu'elles sont allouées sans contrôle des dépenses effectives. Le système est complexe pour les familles, qui bénéficient d’un droit d’option entre le complément de l’AEEH (à partir du complément 2) et la PCH en sus de l’AEEH de base (cf. rapport IGAS de juin 2019). 284.000 enfants bénéficiaient de l’AEEH et de l’AJPP en 2017, pour un budget de 994 M€.
  • AESH : Les personnels chargés d'accompagner des élèves en situation de handicap ont pour mission de favoriser l'autonomie de l'élève, qu'ils interviennent au titre de l'aide humaine individuelle, de l’aide humaine mutualisée ou de l'accompagnement collectif dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS). Les 62 500 AESH (en ETP) sont financés sur le programme 230 du ministère de l'Éducation Nationale (935 M€ en 2020).

La FNASEPH (Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap – Grandir et Vivre en société) milite pour la scolarisation et le
développement de l’accompagnement, en tout temps et milieu de vie ordinaire, quel que soit le handicap pour les enfants, adolescents et jeunes adultes en situation de handicap.

Elle rassemble 23 associations de familles, elles même avec des profils très différents : associations nationales / collectifs régionaux ou départementaux, rassemblant eux-mêmes
plusieurs associations.

La FNASEPH a été créée en 1996 pour développer l’aide humaine à l’école (initiée par des parents en 1982). Elle s’est investie sur la question des auxiliaires de vie scolaire (AVS) en
termes de soutien des associations dans la gestion des services d’AVS, d’aides techniques et logistiques, de moteur de l’innovation sociale ... Depuis septembre 2003, l’Éducation
Nationale assurant la gestion des AVS, la FNASEPH poursuit son action de façon différente.
Elle propose une aide aux familles et aux personnes, aux collectifs associatifs départementaux. Elle participe aux niveaux national et local aux instances de réflexion des politiques publiques. Elle milite pour que soit reconnue la place et le rôle des familles, leur expertise de vie.

Au sein du CNCPH, la FNASEPH s’engage résolument pour une véritable société inclusive, dont l’un des piliers est évidemment une école inclusive.

Dans ce contexte, La FNASEPH souhaite apporter une première contribution aux débats, et particulièrement autour des deux points mentionnés précédemment.

Doit-on intégrer l’AEEH et l’AJPP dans le périmètre de la 5ème branche ?

L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), sa majoration et ses compléments, et l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) sont des prestations de la branche famille.

« L'AEEH, […] est une prestation familiale de Sécurité sociale, prestation en espèce, destinée à compenser une partie des frais supplémentaires supportés par toute personne ayant à sa charge un enfant handicapé (articles CSS Art. L.541-1 et suivants), et est versée par les organismes débiteurs des prestations familiales (ODPF), aujourd’hui caisses d'allocations
familiales (Caf) ou caisses de mutualité sociale agricole (MSA). Elle a un caractère forfaitaire : son montant est fixé en pourcentage de la base mensuelle des allocations familiales (BMAF), pour l’AEEH de base (32%) avec des taux différents en fonction des compléments.

L’allocation journalière de présence parentale (AJPP), qui a remplacé en 2006, l’allocation de présence parentale créée en 2001, peut, elle, être versée aux parents qui s’occupent d’un
enfant gravement malade, accidenté ou handicapé, pour chaque journée passée auprès de l’enfant (dans la limite de 22 jours par mois-310 jours sur la période entière de l’AJPP) et ce
pour une période de 3 ans maximum. Il s’agit d’un autre type de prestation familiale, d’inspiration plus récente, visant non à couvrir des charges, mais à compenser la perte de
revenu entraînée par la nécessité d’une présence parentale. »1

Le rapport de juin 2019 de Daniel Lenoir (IGAS), établi dans le cadre des ateliers préparatoires à la Conférence Nationale au Handicap (CNH) de février 2020 a clairement montré les multiples intrications et recouvrements existants entre des allocations de type prestations familiales, répondant aussi à des besoins de compensation individuelle – théoriquement du ressort de la PCH -, et financement de frais de santé non couverts directement par l’assurance maladie actuellement.

4 composantes avaient alors été mentionnées :

  • Un complément familial handicap (branche famille)
  • Une allocation de présence parentale ne relevant pas de la compensation du handicap (branche famille)
  • Des frais de soins complémentaires non pris en charge par l’assurance maladie (branche Assurance maladie)
  • Des frais de compensation du handicap – éligibles à la PCH (5ème branche)

La FNASEPH est attachée à ce que le droit à l’AEEH de base soit maintenu pour les familles, dès lors qu’un taux minimum de 50% d’incapacité est évalué2, redéfini dans le rapport Lenoir comme un « complément familial handicap ». C’est un droit ouvert aux familles quel que soit le handicap, reconnaissant le principe d’une allocation, pour marquer la situation particulière de ces familles (à famille égale).

La reconnaissance des 4 composantes du modèle actuel - citées précédemment -pourrait permettre d’aboutir une nouvelle répartition de ces prestations entre les différentes
« caisses » et d’envisager le transfert d’une partie des compléments d’AEEH dans la 5ème branche, sous réserve :

  • De reconnaitre des frais de rééducation (ergothérapie, psychomotricité, psychothérapie, …) actuellement encore à la charge des familles, et supportés grâce à l’AEEH dans certains territoires et à certaines conditions : ces frais devront intégrer des forfaits soins de la branche Assurance Maladie, comme prévu dans l’engagement 9 de la CNH de 2020.
  • De revoir le guide barème pour mieux prendre en compte les besoins des enfants et des jeunes en matière de compensation du handicap (trop restrictif à ce jour), en contrepartie de la disparition du droit d’option, dans un objectif de simplification administrative, toujours dans le périmètre des missions de la MDPH.
  • De revoir et d’élargir des droits actuellement réduits et pénalisants dans le cas du choix de la PCH (financements séjours de vacances, aides techniques, affiliation AVPF, …).
  • De simplifier voire réduire les contrôles d’effectivité autant que possible, facteurs de contraintes administratives supplémentaires pour des familles déjà lourdement
    impactées.
  • De s’assurer que les engagements pris concernant la fiscalisation des revenus aidants familiaux et l’impact sur le RSA se concrétisent par des textes règlementaires.

Dans ce contexte, la FNASEPH recommande l’application de la recommandation « scénario N° 6 » du rapport Lenoir, tout en prenant appui sur une véritable étude de coûts
permettant de déterminer les charges d’assurance maladie et de compensation du handicap supportées par la branche famille, de vérifier que les droits des familles soient
garantis, voire renforcés, et dans une logique d’accès à des dispositifs de droit commun.

Doit-on intégrer les AESH dans le périmètre de la 5ème branche ?

S’agissant de l’aide humaine à l’école, la FNASEPH affirme que l’école inclusive ne doit pas se limiter à une augmentation régulière des postes d’AESH, dans la mesure où les AESH ne sont qu’un des éléments du processus de l’école inclusive mais pas le seul, pas le premier à rechercher et à mettre en oeuvre. Ce biais structurel est même devenu un frein au déploiement des autres éléments (adaptation de l’environnement scolaire aux besoins éducatifs particuliers, adaptation et diversification des modes de scolarisation, formation des enseignants, enseignants spécialisés, coopération médico-sociale dans les murs de l’école, etc…)

Nous souhaitons qu’une réflexion s’engage autour des notions d’accessibilité et de compensation à l’école, comme évoquée dans la recommandation n°37 du CNCPH3. Il faut étudier l’affectation « d’agents de l’école inclusive » au sein des dispositifs scolaires permettant de développer une logique prioritaire d’accessibilité, avant d’envisager, si nécessaire, un accompagnement individuel dans le cadre de la compensation d’un handicap.

D’une part, il faut transformer les postes d’AESH-m (mutualisé) dans cette fonction nouvelle d’agents d’accessibilité éducative et pédagogique, tant auprès de l’élève que de  l’enseignant, des parents et de la communauté éducative dans son ensemble. En conséquence, ils agissent sous la responsabilité collective de l’équipe éducative et pédagogique, sans relever d’une notification d’aide humaine. Ils restent bien dans le périmètre de l’Éducation Nationale et sont installés dans les différents établissements scolaires en nombre d’ETP au prorata du nombre d’élèves à besoins éducatifs particuliers, dont les élèves en situation de handicap scolarisés.
De cette façon un droit commun relatif à la scolarisation est créé dans la droite ligne du rapport de l’ONU (CIDPH).

Cette démarche est légitimement possible puisque s’agissant des AESH-co, ils peuvent être dès à présent considérer comme des agents de l’école inclusive, leurs affectations auprès d’une ULIS n’étant pas corrélée à une notification individuelle, ni à une quotité horaire, ni à une évaluation et notification de la MDPH.

D’autre part, il faut maintenir les postes AESH-i (individuel), en fonction du besoin objectivé de compensation, dont l’évaluation et la notification d’aide humaine relèvent de la responsabilité des instances de la MDPH.
Les AESH-i pourraient ainsi entrer dans le périmètre de la 5ème branche, avec un élargissement de leurs missions à tous les temps et lieux de vie, bien évidemment dans le cadre d’une révision des critères d’éligibilité au volet aide humaine de la PCH. Cette révision est rendue par ailleurs nécessaire du fait de la suppression possible du droit d’option entre AEEH et PCH si le scénario 6 du rapport Lenoir (page 30) était retenu.
La question de leur financement par redéploiement des budgets EN est à poser dans le cadre de cette 5ème branche, avec 2 options possibles : par un système dédié ou via l’attribution de la PCH éligible sur les différents temps et lieux de vie. 4

Pour rappel, aujourd’hui près de 50% des 62.500 AESH (en ETP) exercent des fonctions d’AESH-i.

Cependant, la FNASEPH souhaite attirer l’attention sur le fait que des familles pourraient être inquiètes de ces nouvelles dispositions d’accompagnement. Si les AESH-m sortent du périmètre des notifications d’aide humaine de la MDPH, ils sont maintenus comme une disposition du PPS pour les élèves en situation de handicap. Il convient en contrepartie pour donner de nouvelles garanties pour les familles, de rendre opposables les dispositions du PPS relatives aux aménagements et adaptations pédagogiques et à toute prise en compte de la situation de handicap par les enseignants.
Autre vigilance : le nombre d’AESH-m intervenant auprès des élèves à besoins éducatifs particuliers doit être bien mesuré de façon à couvrir l’ensemble des besoins et maintenir leur présence auprès des élèves en situation de handicap.

La FNASEPH s’interroge sur la gestion spécifique des AESH-i. Il semblerait plus pertinent de concevoir leur gestion dans le périmètre d’un service départemental dédié à l’aide humaine des jeunes en tout temps et lieux de vie en interaction avec les PIAL et les agents d’accessibilité éducatives et pédagogiques.

Par ailleurs, nous rappelons que des agents d’accessibilité en centres de loisirs pourront aussi être financés en partie dans le cadre de la future COG de la CNAF (via le bonus inclusif), permettant de réserver l’intervention future d’AESH-i aux situations les plus complexes, nécessitant une compensation individuelle financée par la PCH.

Autre point de réflexion : Doit-on intégrer l’Emploi Accompagné dans le périmètre de la 5ème branche ?
La FNASEPH demande un espace de financement de l’accès et du maintien à l’emploi, intermédiaire entre le médico-social (ARS) et les dispositifs de droit commun souvent insuffisants. La 5ème branche pourrait contribuer à financer des réponses d’accompagnement (par exemple les jobs coaching, ...).

Enfin concernant la gouvernance :
Dans la mesure où la gouvernance de la 5ème branche sera organisée par la CNSA, nous insistons pour que la représentation associative des personnes et des familles au sein du Conseil soit établie de façon complémentaire et à part égale avec les organismes gestionnaires du secteur médicosocial. Une organisation de type « collège » pourrait être pertinente à construire.

 

 

1 Extrait du rapport de Daniel Lenoir, « Améliorer et simplifier la compensation du handicap pour les enfants.
Clarifier l’articulation entre l’AEEH et la PCH » de juin 2019 - IGAS

2 Les débats sur la création de la 5e branche doivent être par ailleurs une occasion pour réviser – enfin – le guide barème !

3 Recommandation n°37 – École Inclusive : État des lieux, réflexions et recommandations du CNCPH – novembre 2018 : En lieu et place des AVS mutualisés, étudier l’affectation “d’acteurs d’accessibilité” au sein des dispositifs scolaires permettant de développer une logique prioritaire d’accessibilité, avant d’envisager si nécessaire un accompagnement individuel dans le cadre de la compensation

4 Il sera alors nécessaire d’étudier plus en détail la possibilité d’avoir recours aux modes prestataires ou mandataires selon le choix des familles.

 

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